Page 77 - Recueil Pro Patria 151 à 300
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I
ssu d'une famille de militaires originaire de Moselle, Paul Le Marchand est né le 24
janvier 1929 à Montigny-les-Metz. N'ayant que six ans à la mort de sa mère, il passe
deux années en pension dans les Côtes d'Armor avec son frère. Il regagne le foyer
paternel en 1937, passant dès lors son enfance au gré des mutations de son père, officier du
génie.
A peine âgé de 17 ans, il s'engage au 64° régiment d'artillerie de Meknès. Il est nommé
brigadier en octobre 1946. Vite remarqué par ses supérieurs pour son exceptionnelle motivation, il
est promu maréchal des logis deux ans plus tard.
L'année 1949 marque un tournant décisif dans sa vie : quittant l'Afrique pour
l'Indochine, il débarque à Haïphong le 18 avril.
Paul Le Marchand s'affirme comme un sous-officier dynamique et énergique, respecté
de tous. Son courage et sa détermination au feu sont remarquables. Il se distingue le 13 octobre
1949 au Tonkin, en assurant la liaison entre deux unités, sous un feu violent. Quelques mois plus
tard, à la tête de son groupe de commandos, il porte secours à une patrouille attaquée par des
rebelles fortement armés. Après avoir neutralisé une mitrailleuse ennemie, il contraint l'adversaire
à se replier, sauvant ainsi la patrouille de l'extermination.
Sa bravoure et son comportement exemplaires lui valent, au mois d'avril 1950, une
citation à l'ordre du régiment et l'attribution de la croix de guerre des théâtres d'opérations
extérieurs avec étoile de bronze.
Détaché à l'encadrement du commando d'An Thai, Paul Le Marchand participe à toutes
les opérations dans lesquelles son unité est engagée. Il est à l'origine de la récupération d'une
dizaine d'armes légères, ainsi que d'une quantité importante de mines et de grenades. En mai
1950, il se lance à l'attaque d'un village fortifié. Avec son groupe, il est pris sous le feu de deux
armes automatiques rebelles et engage le combat contre un adversaire supérieur en nombre.
Galvanisé par l'exemple de son chef, le groupe inflige de lourdes pertes à l'ennemi et l'oblige à
décrocher. Fin 1950, en récompense de son courage et pour son sens aigu du commandement, il
est cité à l'ordre de la division avec attribution de la croix de guerre des théâtres d'opérations
extérieurs avec étoile d'argent.
Audacieux, intelligent et plein d'allant, Paul Le Marchand donne bientôt une nouvelle
preuve de sa valeur. Le 30 mai 1951, lors de l'attaque du poste de Ninh-Binh au Nord Vietnam, il
se porte volontaire pour servir la mitrailleuse, montée sur tourelle et non protégée. Sa conduite est
héroïque. Pris à partie de tous côtés, il riposte sans répit pendant plus de 7 heures et réussit par
son tir à rétablir une situation très compromise. Sous un feu intense, alors que sa mitrailleuse
s'enraye, avec autant de calme qu'à l'exercice, il la démonte, la nettoie et reprend le tir. En fin de
matinée, il est grièvement blessé à son poste de combat, d'une balle en pleine poitrine. Rapatrié
sanitaire le 23 juillet 1951, son attitude héroïque est récompensée par la médaille militaire et par
une promotion au grade de maréchal des logis-chef.
Affecté comme instructeur aux écoles de Coëtquidan, il galvanise les jeunes élèves
officiers qu'il forme. C'est alors qu'il est admis dans le corps des sous-officiers de carrière en
décembre 1953 et nommé au grade d'adjudant.
A l'automne 1957, Paul Le Marchand est affecté au 18°régiment d'artillerie en Algérie.
Le 28 novembre, lors d'un accrochage avec des rebelles, il est grièvement blessé alors qu'il porte
secours à son radio qui vient d'être atteint par un tir rebelle. Poursuivant le combat face à un
ennemi supérieur en nombre, sa section s'accroche aux pentes escarpées d'un petit piton. Tout en
couvrant le repli de ses hommes, l'adjudant Le Marchand stoppe les rebelles qui montent à
l'assaut, grâce à la précision de ses tirs à la carabine et à la grenade. Alors qu'il combat pied à
pied, défendant farouchement chaque mètre de rocaille, il est fauché par un tir ennemi et est tué
sur le coup.
Brillant sous-officier, modèle de bravoure et de dévouement, faisant preuve d'une
générosité sans faille, doté d'un excellent esprit de camaraderie, l'adjudant Le Marchand a su
s'attirer l'estime de ses chefs et l'affection de ses subordonnés. La légion d'honneur et la croix de
la valeur militaire avec palme sont venues rendre un dernier hommage à ce sous-officier
exceptionnel, mort à 28 ans, qui a donné la preuve de son audace et de son courage au service de
la France.