Page 297 - Recueil Pro Patria 151 à 300
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Sous-Officiers de La Marne - 1914
n 1914, l’Europe domine le monde. Les grandes puissances rivalisent entre elles et forment
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des alliances défensives. L’Allemagne, l’Autriche-Hongrie et l’Italie forment la triple alliance
ou Triplice alors que le Royaume-Uni, la France et l’Empire Russe forment la triple
entente. L’attentat de Sarajevo du 28 juin 1914 déclenche le jeu des alliances qui débouche sur une guerre
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européenne puis mondiale. L’Allemagne déclare la guerre à la Russie le 1 août 1914 puis à la France, le 3
août. La Patrie est à nouveau menacée par l’envahisseur et la volonté d’une revanche après la défaite de
1870 attise la motivation du peuple français derrière son armée. L’armée française est sous les ordres du
général Joffre. Quatre millions six cents mille hommes sont mobilisés et s’apprêtent à reprendre l’Alsace et
la Lorraine au son des musiques militaires et des chants patriotiques. Dans l’esprit de tous, la guerre sera
courte. Il faut en finir, c’est la « DER des DER », dit-on dans un élan patriotique qui symbolise l’union sacrée.
Le plan Schlieffen de l’État-Major allemand est simple et brutal. L’idée tactique des Allemands est de
passer par la Belgique avec comme objectif Paris afin d’anéantir l’armée française en six semaines, prise à
revers derrière la frontière franco-allemande.
Septembre 1914, après un mois de guerre, tout semble perdu pour la France : son armée recule jour
après jour face à l’offensive allemande. Paris est menacé et le gouvernement s’est replié à Bordeaux. Déjà
les généraux allemands croient tenir la victoire. Mais le général Joffre décide de saisir une dernière chance :
stopper les Allemands au niveau de La Marne et repousser l’ennemi coûte que coûte par une contre-
offensive.
En rase campagne, on lit la proclamation de Joffre : « Alors que s’engage la bataille dont dépend le salut
du pays, il importe de rappeler à tous que le moment n’est plus de regarder en arrière. Tous les efforts
doivent être employés à attaquer et refouler l’ennemi. Une troupe qui ne peut plus avancer devra coûte que
coûte garder le terrain conquis et se faire tuer sur place plutôt que de reculer. Dans les circonstances
actuelles, aucune défaillance ne peut être tolérée. Général Joffre ».
Le dimanche 6 septembre, le sursaut de la bataille de La Marne commence sur un front de 250
kilomètres, des portes de Paris jusqu’à Verdun. Le dispositif français se décline en cinq armées renforcées
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du corps expéditionnaire anglais. À l’ouest, la 6 armée de Maunoury défend Paris, au centre la 5 armée de
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Franchet d’Esperey, la 9 armée de Foch et la 4 armée de Langle de Cary, à l’est jusqu’à Verdun, la
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3 armée de Sarrail, les Anglais bouclent le dispositif au sud-est de la 6 armée. Dès la veille, l’armée
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Maunoury aux ordres du défenseur de Paris, le général Gallieni, contre-attaque le flanc ouest de la 1 armée
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allemande. Surprise de la forte détermination française, la 1 Armée de Von Kluck se replie brusquement
pour tenter de contourner Paris par le nord. Gallieni s’en rend compte rapidement, il faut envoyer des
renforts au nord de Paris mais tous les moyens ferroviaires ont été engagés pour déplacer les troupes de
l’est sur le front de La Marne. Il décide de réquisitionner les taxis parisiens pour improviser le premier convoi
motorisé de l’histoire militaire. Ils se rassemblent devant les Invalides. 400 taxis de Paris et 300 voitures de
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louage vont transporter en une nuit, le 103 et 104 d’infanterie, soit cinq hommes par voiture à 50 kilomètres
au nord de Paris. Ils ne seront pas engagés car les Allemands renonceront à tenter de passer par le nord.
Malgré tout, les taxis de La Marne resteront un symbole fort de la cohésion nationale pour la défense ultime
de Paris. Dans le même temps, l’armée de Foch, au centre, stoppe l’axe d’effort allemand par de durs
combats sur Mondement et les marais de Saint-Gond. On se bat au corps à corps, baïonnette au canon en
chargeant au son du clairon derrière le lieutenant ou l’adjudant, chefs de section d’infanterie. Les tirs
d’artillerie et de mitrailleuses déciment les rangs, il faut se relever pour ceux qui sont encore vivants et
repartir à l’assaut sous le cri du sergent.
Le 12 septembre, après une semaine de combats acharnés, les Allemands reculent pour se rétablir en
ligne défensive au niveau de l’Aisne. Ils ne sont pas passés ! Oui, c’est une victoire, une grande victoire. Les
Allemands ont beau le contester, ils n’en reviennent pas.
La bataille de La Marne a brisé l’élan du Kaiser et mis en échec le plan Schlieffen. Elle a sauvé la France
au bord du désastre. Le général Joffre a le sourire pour la première fois depuis le début de la guerre, il
déclare : « Je ne sais pas qui a gagné la bataille de La Marne mais je sais bien qui l’aurait perdu ». Les
troupes françaises sont anéanties par la fatigue des combats et ne pourront pas exploiter cette contre-
offensive victorieuse. Les munitions manquent aussi, les Allemands se sont rétablis sur de solides lignes
défensives. La guerre de position s’engage au lendemain du miracle de La Marne et durera quatre ans,
quatre longues années qu’aucun état-major n’avait prévues. Une guerre d’usure et sinistre dans un décor
lunaire. Une guerre cruelle, celle des tranchées et de la boue, celle de Verdun et du Chemin des Dames où
l’ennemi n’est pas seulement l’Allemand mais l’ennui, le froid, la peur, la mort… Ce monstre froid va dévorer
neuf millions d’hommes à travers toute l’Europe.
Les sous-officiers de La Marne ont largement contribué à ce sursaut national. Ils viennent de toutes les
régions de France, sans oublier l’armée d’Afrique et les alliés britanniques. Ce sont nos parents, nos grands-
parents, nos arrières grands-parents. Sergents, sergents-fourriers, sergents-majors, adjudants, adjudants-
chefs ont combattu du 6 au 12 septembre 1914 pour sauver notre pays. Allant chercher la force d’y croire
encore, c’est avec dévouement et abnégation qu’ils ont permis cette victoire surprise qui changea le cours
de l’histoire dans une des pages la plus meurtrière de toute la Première Guerre mondiale.
Par l’entretien glorieux de leur mémoire, ils méritent très largement d’être pris en exemple par nos jeunes
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élèves sous-officiers de la 297 promotion de l’École Nationale des Sous-Officiers d’Active.