Page 36 - Recueil Pro Patria 1 à 150
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                           Le 23 Octobre à 5 h 15 avant le lever du jour sur le terrain défoncé, les
               premières  vagues  s'élancent.  Face  au  fort  de  la  Malmaison:  les  zouaves  et  les
               coloniaux  de  la  division  Guyot  de  Salins  et  les  Chasseurs  Alpins  de  la  Division
               Brissaud Desmaillet. Le Bataillon Giraud du 4° Zouaves a été désigné pour enlever
               le fort.
                           Rapidement les lignes ennemies sont atteintes. Les premières tranchées
               et les abris "ne forment plus qu'un champ d'entonnoirs". La deuxième tranchée est
               comblée à demi. Elle est franchie. Des mitrailleuses allemandes appliquent un tir
               rasant particulièrement meurtrier. Les vagues continuent à progresser. L'artillerie
               française  tire  des  obus  incendiaires  sur  le  fort  qui  semble  maintenant  un  volcan
               dans la nuit. Le 3° Bataillon du 4° Zouaves court à la tranchée du Casse tête, saute
               dans la tranchée de la Carabine ou il s'empare d'une mitrailleuse. Le tir d'artillerie
               est  reporté.  Voilà  les  "poilus"  et  les  "bleuets"  devant  le  grand  fossé  du  fort.  Ils
               contournent l'ouvrage par l'est et y pénètrent par des brèches. Le zouave Barré un
               paysan du Poitou, entre le premier. Il y a encore du monde dans les casemates. Une
               à  une  les  mitrailleuses  ennemies  sont  muselées  au  prix  de  furieux  assauts.  Les
               Allemand  survivants  se  rendent.  Subitement  tout  tir  cesse  sur  le  fort  ruiné.  Une
               fusée tricole devait annoncer la prise de l'objectif; elle ne part pas. Alors un zouave
               escalade les ruines et plante le fanion de son unité sur le fort de la Malmaison. Il
               est six heures et le soleil se lève pour admirer cela.
                           Pendant  ce  temps,  au  sud  de  la  Malmaison,  Marsouins  et  Tirailleurs
               nettoient  les  carrières  de  Bohéry;  à  l'est,  les  Chasseurs  progressent  à  la  grenade
               dans les cratères du Panthéon. A 9 h 15, la seconde vague d'assaut s'élance. Nos
               pièces  d'artillerie  ne  cessent  de  marteler  tout  le  plateau  et  la  vallée  de  l'Ailette.
               L'artillerie  allemande  réplique.  La  belle  ordonnance  de  nos  troupes  est  disloquée,
               mais chacun regarde son caporal ou son sergent. En avant. Le lendemain, enfin, le
               ravin des bovettes et Chavignon seront atteints.

                           Ainsi  débordé  à  leur  droite,  les  Allemands  se  replieront  au  Nord  de
               l'Ailette. Inexpugnable depuis 1914, le plateau du Chemin des Dames est arraché à
               l'adversaire au soir du 25 Octobre 1917.
                           Elèves  sous-officiers  de la  22ème  promotion,  il  y exactement  cinquante
               ans  ce  soir,  "  les  bleuets"  et  "les  poilus  de  14",  trois  musettes  de  vivres  et  de
               grenades  sur  le  dos,  deux  bidons  de  deux  litres,  les  cartouchières,  l'outil  au
               ceinturon  et  la  baïonnette  au  canon,  inscrivaient  la  Malmaison  et  le  Chemin  des
               Dames dans l'Histoire avec leur foi, leur courage physique, leur résistance morale,
               leur ténacité. Avec le sang de 18.000 d'entre eux.


                           Tous les jours de votre carrière, songez à l'exemple de ces ainés, car
               toujours "la victoire appartient au plus opiniâtre".
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