Page 279 - Recueil Pro Patria 151 à 300
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Sergent-chef Raymond WEGSCHEIDER
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AYMOND Wegscheider naît le 20 juin 1927 à Sainte-Marie-aux-Mines en Alsace.
Après des études à Metz, il est évacué avec sa famille vers Royan lorsque la
France capitule en juin 1940 puis rejoint la Lorraine quelques années plus tard.
Réquisitionné par les Allemands à l'été 1944 pour l'Arbeitsdienst - le « service du travail » - il est
immédiatement dirigé vers la Pologne puis participe à la retraite des troupes allemandes au début
de l'année 1945 avant de s'évader avec un camarade lorrain. Il ne retrouve sa famille qu'après la
signature de la capitulation et sera reconnu par décision du ministre des anciens combattants et
victimes de guerre en 1963 comme un « Malgré-Nous ».
Après avoir travaillé en Moselle, il commence son service militaire en septembre 1947
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dans l'infanterie coloniale et se porte volontaire pour l'Afrique Occidentale Française. Affecté au 7
régiment de tirailleurs sénégalais de Dakar, il réussit brillamment les différents examens,
gravissant un à un les échelons pour accéder au grade de sergent.
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À son retour en mai 1950, il est affecté au 110 régiment d'infanterie coloniale
stationné à Constance en Allemagne. Il se porte volontaire pour servir au sein du bataillon français
de l'ONU en Corée. Sa carrière prend alors un nouveau départ en ce mois de mai 1951.
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Le sergent Wegscheider atteint le fameux 38 parallèle le 4 juillet 1951 où il est affecté
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à la 2 compagnie pour y commander un groupe de Sud-Coréens. Il deviendra véritablement leur «
chef de sang » après son premier accrochage où il montrera le plus bel exemple de courage et de
mépris du danger. Cité à l'ordre de l'Armée fin septembre, il se voit attribuer la Croix de guerre des
Théâtres d'opérations extérieures après avoir été blessé une première fois le 26 septembre 1951
près de Sataeri. Il refusera l'évacuation pendant l'action.
Lors de la bataille de « Crève-Cœur », sa section se prépare le matin du vendredi 13
octobre à s'emparer du dernier point de résistance, la côte 851. Il entraîne son groupe dans un
assaut impétueux, recevant une première balle dans la cuisse gauche. Pourtant, il persiste et
arrive à la tête de ses hommes sur l'objectif, où il reçoit une autre balle qui lui brisera la colonne
vertébrale, après lui avoir perforé un poumon. Évacué par hélicoptère, ayant reçu l'extrême-
onction d'un prêtre américain, il sera opéré plusieurs fois durant deux mois. Son chef de section le
remerciera pour son action déterminante, et il sera nommé au grade de sergent-chef le 30
novembre 1951. Il quitte l'Extrême-Orient en janvier 1952 et reçoit des soins durant deux ans à
l'hôpital du Val-de-Grâce. Devenu paraplégique, il rejoint une clinique spécialisée de New-York
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avec l'aide de la 2 division d'infanterie américaine, qui a lancé pour l'occasion une souscription
afin de subvenir aux frais médicaux. Il y séjournera presque deux ans.
À son retour en France, il poursuivra sa vie dans un fauteuil roulant, entouré de sa
femme, une infirmière du Val-de-Grâce qu'il a épousée en 1960, et de ses proches. Toujours
optimiste et rayonnant de gaieté, engagé dans de nombreuses associations, il s'éteint en 1995 à
Blou, près de Saumur, à l'âge de 68 ans.
Le sergent-chef Wegscheider a choisi de servir son pays en s'engageant dans les
troupes coloniales. Animé du plus bel état d'esprit, avide d'action, il aura effectué une courte mais
riche carrière en opérations durant ses trois mois en Corée. Ses ambitions auront été stoppées par
sa dernière blessure, et il est radié des contrôles en décembre 1953 avec la médaille militaire,
deux citations à l'ordre de l'Armée, deux blessures de guerre et la « Silver Star » américaine. En
récompense des services rendus, il sera fait chevalier de la Légion d'honneur en 1957, puis élevé
au grade d'Officier dans cet ordre en 1988. Cette dernière distinction témoigne de la
reconnaissance de la Nation à ce sous-officier exceptionnel qui, pour son engagement et sa
bravoure, mérite d'être cité en exemple aux jeunes générations.