Page 139 - Recueil Pro Patria 151 à 300
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                          ssu d'une famille d'ouvriers, Roger GROSSIR est né le 25 mai 1904 à Sainte-Savine,
                          près  de  Troyes.  Pupille  de  la  nation  après  le  décès  de  son  père  lors  de  la  Première
                          Guerre mondiale, il est appelé sous les drapeaux en 1924 au 170  régiment d'infanterie,
            stationné à Kehl en Allemagne. Très vite remarqué pour sa forte personnalité, il est désigné pour suivre
            le peloton d'élèves gradés. Fin 1925, libéré de ses obligations militaires, le caporal GROSSIR retrouve
            son emploi à l'usine de textiles de Troyes. Entre 1930 et 1936, il effectue deux périodes d'instruction
            militaire au camp de Mailly, au cours desquelles il est promu sergent, puis sergent-chef, tandis que le
            spectre de la guerre menace à nouveau.
                        Rappelé à l'activité en août 1939 au centre de mobilisation d'infanterie n° 83 stationné à
                                                                   e
            Auxerre, il est chargé d'instruire les jeunes recrues à la 22  compagnie. Se distinguant par ses qualités
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            d'instructeur,  le  sergent-chef  GROSSIR  est  nommé  adjudant  trois  mois  plus  tard.  Affecté  au  204
            régiment d'infanterie en mars 1940, l'adjudant GROSSIR est engagé immédiatement dans de violents
            combats sur le plateau de Saulnes en Lorraine, puis en arrière de la ligne Maginot. Les pertes, qui
            atteignent le tiers des effectifs, témoignent de l'âpreté de la lutte. C'est avec l'esprit d'honneur et de
            sacrifice que ce courageux sous-officier poursuit quelques semaines encore ces combats inégaux. Son
            unité finit par céder sous le déferlement des forces allemandes. Il est fait prisonnier avec nombre de
            ses camarades près de Toul puis transféré en Allemagne au Stalag 12 B à Trèves.
                        Refusant avec détermination de se soumettre à l'ennemi, il parvient à s'évader. En 1942,
            après le débarquement des forces américaines en Afrique du Nord, il décide de rejoindre les Forces
            Françaises  Libres  en  passant  par  l'Espagne  et  le Portugal.  Arrêté  par  les Carabiniers,  il  est  détenu
            dans les terribles camps de Barcelone, de Figuéras, de Gérone, puis de Miranda. Au cours de l'été
            1943,  la  délégation  française  de  la  Croix  Rouge  négocie,  auprès  du  gouvernement  franquiste,  la
            libération des volontaires désirant rallier l'armée d'Afrique du Nord. En août de cette année, ayant reçu
            un  ordre  de  rapatriement  pour  le  Maroc,  l'adjudant  GROSSIR  traverse  l'Espagne  en  train  puis
            embarque à Sétubal au Portugal. A son arrivée à Casablanca, il a le privilège, avec ses camarades de
            combat, d'être présenté au général Leclerc.
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                        Engagé au 2  bataillon du régiment de Marche du Tchad (RMT), il embarque six mois plus
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            tard  à  Mers  el  Kébir  pour  l'Angleterre.  Le  1   août  1944,  l'adjudant  GROSSIR  traverse  la  Manche,
            débarque à Sainte-Marie-du-Mont en Normandie et prend part aux opérations de Grandcamp. Avec la
            Division Leclerc, il participe à la libération de la capitale, à l'ouverture de la route de la Liberté vers
            Provins, Troyes, puis au franchissement des Vosges. Le 12 septembre 1944, dans les durs combats de
            Dompaire,  l'adjudant  GROSSIR  est  stoppé  par  un  violent  tir  ennemi  qui  met  en  feu  ses  véhicules.
            Faisant  preuve  de  courage  et  de  sang-froid,  il  risque  alors  sa  vie  pour  sauver  un  homme  de  son
            équipage.  Il  est  cité  pour  cette  action  à  l'ordre  de  la  division.  Le  22  novembre  1944,  poursuivant
            l'offensive  vers  le  Rhin,  l'adjudant  GROSSIR  se  porte  volontaire  pour  une  mission  de  patrouille  à
            l'entrée  de  Saverne.  Démontrant  son  audace  et  son  sens  du  combat,  il  procède  au  nettoyage  des
            abords du pont commandant l'entrée de la ville. Au cours de cette action, il est grièvement blessé par
            balle à l'avant-bras. Cette double fracture l'oblige à être évacué sur l'hôpital de Dijon puis au Val-de-
            Grâce. Nommé adjudant-chef à titre exceptionnel en janvier 1945, la médaille militaire lui est conférée
            six mois plus tard pour toutes ces actions avec attribution de la croix de guerre 1939-1945 avec palme.

                        En 1948, l'adjudant-chef GROSSIR est définitivement réformé des suites de ses blessures.
            Poursuivant  son  activité  professionnelle,  resté  très  proche  de  ses  camarades  du  RMT,  il  fonde  et
            préside l'amicale des anciens de ce glorieux régiment. Durant cette période, il est fait successivement
            chevalier  puis  officier  dans  l'Ordre  de  la  Légion  d'honneur.  En  1996,  l'adjudant-chef  GROSSIR  est
            admis comme pensionnaire à l'Institut National des Invalides où, très vite, il intègre la Garde d'Honneur
            à l'Etendard qui porte dans ses plis l'inscription sobre : « Tous les champs de Batailles ». Il s'éteint au
            terme d'une vie édifiante et digne le 10 novembre 2001 à la veille des cérémonies commémoratives de
            l'Armistice de 1918, qui avait si profondément marqué sa jeunesse.

                        Officier de la Légion d'honneur, Commandeur de l'Ordre National du Mérite, ce médaillé
            militaire  a  toujours  été  un  homme  d'action  et  de conviction,  décidé  à  combattre  et  à  vaincre.  Ayant
            toujours mis son sens élevé de l'honneur, de la droiture, de la fidélité et de la rigueur morale au service
            de son pays, il aura rayonné les plus belles qualités du corps des sous-officiers.
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