Page 27 - Recueil Pro Patria 1 à 150
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15° promotion
- DOUAUMONT -
Occupé depuis le 25 Février 1916 par les troupes allemandes Douaumont pilier angulaire
nord-est des fortifications permanentes de Verdun, se dresse comme un belvédère et
commande par ses observatoires et ses feux l'ensemble du camp retranché.
Après une vaine tentative, faite le 24 Mai pour le reprendre, l'affaire est reconduite à nouveau
le 24 Octobre avec des moyens supérieurs en particulier en artillerie lourde.
Huit divisions d'infanterie, 654 pièces d'artillerie dont 20 de calibres allant du 270 au 400
participeront à l'attaque. Le 17 Octobre, dans son ordre du jour le Général Nivelle,
Commandant l'armée de Verdun précise:
" Une artillerie d'une puissance exceptionnelle maîtrisera l'artillerie ennemie et ouvrira la
voie aux troupes, La préparation, dans toutes ses parties est aussi complète, aussi parfaite
que possible. Quant à l'exécution, elle ne saurait manquer d'être également parfaite grâce à la
discipline, à la bonne instruction, à la confiance et à l'entrain résolu des troupes qui auront
l'honneur d'en être chargées".
Le Général Mangin commande les divisions d'attaque.
Le 20 Octobre, nos tirs commencent. Ils s'intensifient jusqu'au 24. L'artillerie française
apparaît vraiment comme une machine à broyer qui livrera l'ennemi, pantelant et désemparé.
A 11 h 40 le 24 Octobre, l'infanterie part à l'attaque dans un brouillard épais qui a masqué les
mouvements préparatoires, assuré la surprise et permis aux premières vagues d'échapper à la
réaction initiale du canon ennemi. Le Régiment Colonial du Maroc a reçu la tâche la plus
glorieuse, mais aussi la plus dure: prendre Douaumont. Le 1° bataillon arrive à quelque 300
mètres du fort, quand le brouillard s'étant déchiré, il s'aperçoit qu'il est seul dans la plaine.
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Du 8 bataillon qui devait le suivre pour s'emparer du fort nul homme n'apparait à l'horizon.
Que faire ?
Eh bien, il le prendra tout seul.
Son chef commande l'attaque immédiate, les ordres s'envolent, frémissants, martiaux.
Transfigurés, au pas de course, les compagnies obéissent. En tête de la compagnie Brunet une
patrouille de combat commandée par un humble mais héroïque caporal, Barranger, saute
hardiment dans le fossé du fort se précipite sur le coffre de contrescarpe. Déjà les mitrailleurs
ennemis engagent les bandes, vont tirer; à coup de crosse, la patrouille Barranger les
assomme à leurs postes.
De son coté la compagnie Mazeau se rue dans la gorge et s'en empare, La compagnie
Fredaigne les suit, commandée par un adjudant, tous les officiers ayant été tués au cours de
l'attaque. Alors, un torrent d'hommes se jette dans les fossés, grimpe sur le fort; envahit les
superstructures et donne la main à quelques hommes du 321° R.I qui, cherchant la liaison,
sont montés les premiers sur le fort, près de la tourelle de mitrailleuse de l'angle nord-est.
C'est un calvaire, mais un calvaire triomphal, le fort est pris. La journée du 24 Octobre
concrétisée par la prise de Douaumont avait jeté dans le camp des Alliés un rayon de gloire,
en même temps que de grandes espérances. Elle annonçait déjà la victoire finale et la France
trouvait dans le nom de Verdun, pour sa grandeur morale, une parure d'un incomparable
éclat. Elèves sous-officiers de la 15° promotion qui avez maintenant l'honneur de porter le
nom de Douaumont, souvenez-vous toujours de la conduite héroïque et de la bravoure "des
combattants de Verdun".