Page 121 - Recueil Pro Patria 1 à 150
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retrouvons en Afrique du Nord. Affecté au 2ème Bataillon du 24ème R. I.C., ses antécédents
        et ses qualités remarquables le font immédiatement désigner comme chef du commando de
        cette unité.

              Dans ce nouveau commandement, KODJA se montre digne de son passé, toujours prêt
        pour n'importe quelle mission, il paie constamment d'exemple. Chef de guerre remarquable
        doté à un rare degré de toutes les qualités qui caractérisent le combattant de contre-guérilla :
        initiative, astuce, audace, bon sens, mépris du danger, parfaite rectitude morale, simplicité,
        grandeur d’âme, courage indomptable. Il s'impose d'emblée à. ses hommes, les galvanise et
        réussit  à  faire  de  son  commando,  composé  de  cinq  ou  six  européens  et  d'une  vingtaine  de
        harkis, un remarquable instrument de combat particulièrement redouté des rebelles.
              A  27  ans,  le  sergent-chef  KODJA  obtient  sa  dixième  citation  et  est  promu  le  28  août
        1956, Chevalier de la Légion d'Honneur. Il n'a que huit ans et demi de  service.

              Ne se laissant pas griser par ses succès dont il pourrait pourtant être légitimement fier,
        KODJA cherche à faire mieux encore. Il commande et entraine ses hommes au combat avec
        un  brio  de  plus  en  plus  remarquable.  Utilisant  de  multiples  procédés  de  camouflage :  en
        rebelles,  en  nomades,  même  en  femmes,  il  dissimule  son  commando  pendant  des  journées
        entières  dans  des  creux  de  roches,  sous  des  arbres,  derrière  des  touffes  d'herbes,  dans  des
        dunes. Chef hardi mais prudent, il pousse des reconnaissances profondes de jour et de nuit
        dans des régions telles que l'ARZEG, l'AMMAR KRADDOU, le ZELLATOU, le LABRAGUA,
        le MODDIANE et chacun évoque ce que ces noms représentent de traitrise et de fatigue …

              Traquant impitoyablement et sans répit le rebelle, le poursuivant sans relâche, avec une
        rare audace et jusque dans ses repaires les plus inexpugnables ou les plus lointains, il inflige
        aux hors-la-loi des pertes se traduisant par des bilans éloquents, qui lui valent sa nomination
        au grade d'adjudant et deux nouvelles citations, l'une au corps d'armée, et l'autre à l'armée.

              Dans la nuit du 5 au 6 février, il est à nouveau dans l'ombre, veillant sur la sécurité de
        ses hommes qui reposent pour la première fois au cours d'un raid qui dure depuis plus de 36
        heures.
              Sous la pâle clarté du ciel étoilé il aperçoit des ombres qui s'avancent. Lucide, tranquille,
        le  corps  et  l'esprit  tendus  par  la  nouvelle  occasion  qui  s'offre  à  lui,  KODJA  réveille
        discrètement ses hommes et les prépare à l'action brutale et directe dont il a le secret.
              Dans le corps à corps, il va tomber grièvement blessé, continuant à commander par le
        rayonnement dont il a su imprégner ses hommes. Son corps, d'où s'échappe peu à peu la vie,
        devient le centre d'un combat héroïquement obscur.
              À pas lents et comptés, la mort s'approche de KODJA, mais on croirait entendre l'hymne
        qui a si souvent bercé son rêve de Marsouin, sous les Tropiques comme dans les Djebels :


                                     « Et notre regret unanime,
                                     Chère France, 0 pays sublime,
                                     Est de n’avoir pour Toi,
                                     Qu'une vie à donner. »

              La  Croix  d'Officier  de  la  Légion  d'Honneur  est  la  distinction  ultime  que  le  Colonel
        commandant le 24eme R.I.C., épingle sur le cercueil de celui qui rejoint à coup sûr les grands
        noms de notre épopée coloniale.
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